Les Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI), également connues sous le nom de « pierre papier », sont devenues une option d’investissement immobilière populaire ces dernières années. Ce mécanisme permet aux investisseurs de participer indirectement au marché de l’immobilier en acquérant des parts dans une société qui détient et gère un portefeuille diversifié de biens immobiliers. Dans cet article, nous examinerons en détail les SCPI, leur fonctionnement, leurs avantages, leurs risques et leur potentiel en tant qu’instruments financiers. Mais, dans une seconde partie, vous découvrirez pourquoi ces instruments sont dangereux et actuellement l’un des pires investissements à réaliser.
Tout d’abord, pour définir les SCPI, il vous faut comprendre que ce sont des organismes de placement collectif qui permettent à un grand nombre d’investisseurs d’acquérir collectivement un portefeuille immobilier géré par une société de gestion spécialisée. L’argent des investisseurs est rassemblé et utilisé pour acquérir des biens immobiliers diversifiés tels que des bureaux, des commerces, des entrepôts ou des logements. Les SCPI sont d’ailleurs souvent spécialisées sur une thématique précise. Les revenus générés par ces actifs sont ensuite distribués aux investisseurs sous forme de dividendes, dont ont été déduit les frais de gestion du parc. Finalement, une part d’une SCPI est ni plus ni moins qu’une action d’une société d’investissement immobilier.
Les SCPI sont gérées par des sociétés de gestion spécialisées qui sélectionnent les biens immobiliers à acquérir, les gèrent et s’occupent des aspects administratifs liés à l’investissement. Les investisseurs peuvent acheter des parts de SCPI soit au moment de la création du fonds, soit sur le marché secondaire, où les parts sont échangées entre investisseurs. Vous verrez, plus loin dans cet article, que c’est là qu’il peut y avoir un ”hic”. Les revenus issus de la location et de la vente des biens immobiliers sont collectés par la société de gestion, qui soustrait les frais de gestion avant de redistribuer les dividendes aux investisseurs, généralement sur une base trimestrielle. Les SCPI peuvent être fiscalement avantageuses car elles bénéficient souvent du régime des revenus fonciers.
Les SCPI apportent à l’investisseur tout un tas d’avantages qui sont très attrayants pour le grand public mais aussi les acteurs dits “institutionnels”.
Elles permettent, tout d’abord, une certaine diversification : Les SCPI offrent en effet la possibilité aux investisseurs de se diversifier dans le secteur immobilier en acquérant des parts de différents types de biens et de secteurs géographiques, répartissant ainsi leurs risques sans en avoir les multiples inconvénients du quotidien.
Ensuite, ces véhicules d’investissements permettent une accessibilité qui peut arranger les plus modestes. Investir dans l’immobilier directement peut nécessiter des montants importants. Avec les SCPI, les investisseurs peuvent entrer sur le marché immobilier avec des montants plus modestes. Les plus gros portefeuilles ont la possibilité de se diversifier beaucoup plus facilement.
De plus, l’accès à des professionnels de la gestion de biens immobiliers peut séduire les incultes. Les SCPI sont gérées par des experts de l’immobilier qui s’occupent de la recherche, de l’acquisition et de la gestion des biens, libérant ainsi les investisseurs des tâches administratives.
Enfin, certains mettront en avant la notion de liquidité des parts de SCPI puisqu’elles sont plus petites. Contrairement à l’investissement direct dans l’immobilier, les parts de SCPI peuvent être revendues relativement facilement sur le marché secondaire. Mais nous y reviendront un peu plus tard pour ne pas vous laisser dans l’idée que cette liquidité est absolue. Loin de là, à vrai dire…
Comme vous l’avez compris , les SCPI comportent tout de même certains risques et il est important de les énumérer afin que vous soyez en pleine conscience de ce que vous risquez d’acheter.
Premièrement, il existe un réel risque de marché. La valeur des biens immobiliers détenus par la SCPI peut fluctuer en fonction des conditions du marché immobilier. Et vous devinez que l’on y reviendra un peu plus loin.
Deuxièmement,il existe aussi un risque locatif. Si les biens immobiliers ne sont pas loués ou subissent des périodes de vacance, les revenus de la SCPI peuvent être affectés. Vous comprendrez que la société en question n’est pas à l’abri d’erreurs de choix d’investissements sur de mauvais emplacements. La qualité des hommes et femmes de l’équipe devient un critère à considérer.
C’est d’ailleurs le troisième risque des SCPI. Vous êtes face à l’aléas de la qualité des gens de la société de gestion et finalement de son principal dirigeant. Pas facile à détecter quand on débarque dans le milieu. Mais, sachez qu’une mauvaise gestion de la SCPI peut entraîner une baisse des rendements pour les investisseurs.
Quatrième et dernier point, bien que les parts de SCPI soient plus liquides que l’immobilier direct, la revente peut être plus difficile en périodes de marché défavorables. Il est vrai que l’on n’y trouve pas les qualités de la bourse dans ces moments-là.
Lors des dernières années, disons depuis 2010, les SCPI ont connu une popularité croissante auprès des investisseurs en quête de diversification de leurs portefeuilles. Les taux d’intérêt bas et la stabilité relative du marché immobilier ont également contribué à leur attractivité. Cependant, il est essentiel de se rappeler que les performances passées ne garantissent pas les résultats futurs, et que tout investissement comporte des risques. La situation en cette mi-2023 est tout autre et crée une tension palpable sur ce marché en constante progression depuis une 12aine d’années.
La raison profonde de ce retournement de marché est, évidemment, la hausse des taux d’intérêt enclenchée à la mi-2022. Nombre d’analystes avaient prévenu dès la fin de l’année passée qu’il apparaissait des risques évidents de décrochage des marchés immobiliers partout dans le monde. Mais c’est en mars que les banques subissaient un bank-run aux USA et permettaient d’oublier quelque temps le risque systémique de l’immobilier. C’est début juillet que les autorités ont décidé d’alerter clairement la population.
Ainsi, l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) ,dans sa cartographie des marchés et des risques 2023, du début de ce mois de juillet, a mis en lumière les problématiques liées à la hausse des taux et que les fonds immobiliers pourraient avoir à affronter, dans les prochains mois, des problèmes évidemment liés au marché en dégradation très importante. On ne pourra pas lui reprocher de ne pas avoir prévenu des menaces qui pèsent sur les fonds immobiliers français. Quelques jours plus tard, les chiffres du premier semestre tombaient… au sens propre et figuré. Les trois plus importantes catégories de fonds immobiliers grand public (SCPI, OPCI et SCI) ont vu leur collecte chuter de 53% sur les six premiers mois de l’année par rapport à 2022. La messe est dite… Le krach est là. Et bien là.
Les intervenants sont à la manœuvre et les prix baissent déjà fortement. C’est bien évidemment le cas des SCPI qui commencent à voir le vent de panique approché. Amundi Immobilier, une des sociétés de gestion les plus réputées de la place française, a annoncé cette semaine, une baisse importante des prix de parts de trois de ses SCPI de rendement : Rivoli Avenir Patrimoine, Edissimo et Génépierre. Et c’est loin d’être la première à avoir baissé ses prix. Cette décision fait suite à une évaluation du patrimoine des SCPI en juin, en raison de l’inflation et de la fameuse remontée des taux d’intérêt. Les valeurs d’expertise fin 2022 ne sont plus jugées représentatives du marché en mi-2023, entraînant une réduction d’environ 10% des valorisations. Les SCPI concernées par cette décote ont vu leur prix de souscription chuter entre 12 et 17%. Les acquéreurs ne se pressent pas au portillon et croyez moi… ce n’est pas terminé. C’est le spectre de la déflation qui s’enclenche. Pourquoi acheter maintenant alors que l’on pense que cela va continuer à baisser encore et encore?
Donc les acheteurs disparaissent, les vendeurs commencent à s’inquiéter. Les prix baissent… Et cette semaine, les banques centrales continuent à augmenter leurs taux directeurs. Le risque de panique dans les mois qui viennent devient évident… et il se trouve que , généralement, la peur de la panique crée la panique. Phénomène auto-réalisateur. Ces actifs sont , hélas, vendu par des vendeurs et en aucun cas par des conseillers financiers indépendants. Ils insistent donc sur les qualités de leur produit et minorent les risques et défauts de ces véhicules d’investissement. A vrai dire, et ils se gardent bien de vous le dire, la seule donnée qu’il est nécessaire d’intégrer dans vos choix d’investissements, et cela concerne tous les types d’investissement, est de mettre la notion de liquidité au-dessus de tous les autres critères qui vous font choisir un placement financier. La liquidité est mère de sûreté quand ça tourne vinaigre. Et là, le vin est déjà bien bouchonné.
Dans le cas des SCPI, les vendeurs de parts doivent attendre que se présente un acheteur pour se débarrasser de leurs actifs et récupérer de la liquidité. Hors, dans un mouvement baissier comme aujourd’hui, les acheteurs sont rares depuis un bon moment et ce n’est pas avec des taux en hausse qu’ils réapparaîtront rapidement. Vous êtes coincés. Et si par hasard, votre situation personnelle nécessite de vendre vite, vous devrez accepter le prix proposé. On appelle cela les ventes contraintes. Elles sont peu nombreuses mais bradées, et embarquent tout le marché dans la crise. Chirac disait que les emmerdes volent toujours en escadrille… En voilà un parfait exemple.
Bientôt vous verrez la même chose dans le private equity… La même mécanique pour les entreprises qui ne sont pas cotées en bourse. C’est à ce moment-là que l’on se rappellera de l’intérêt de la liquidité du marché boursier et de son intérêt absolu dans les périodes difficiles.