L’écart entre États-Unis et l’Europe s’est creusé depuis l’été 2020. Ce processus a favorisé une forte hausse des taux et de l’inflation aux États-Unis tandis que la situation restait globalement très morne en Europe. Les premiers signaux de reprise apparaissent plus concrètement en Europe, ce qui impacte les taux d’intérêt jusqu’alors restés canalisés.
Reprise européenne et hausse des taux.
Signaux de reprise
Nous l’avons traité dans nos précédents articles, la reprise économique n’est pas encore complétement effective. Ces derniers mois, la reprise se limitait au secteur manufacturier, tandis que les services restaient (et restent encore) lourdement impactés.
La multiplication des déconfinements en Europe dégage deux dynamiques principales. Premièrement, les indicateurs de confiance économique remontent fortement tandis que les services connaissent une petite reprise. Ensuite, le taux d’inflation tend à augmenter malgré le maintien d’un fort taux d’épargne.
Manifestement, la reprise sera bien plus lente qu’aux États-Unis. Cela s’explique par la structure même des économies européennes : très forte fiscalité, surendettement, chômage, faiblesse de la compétitivité, etc. Les signes de hausse des taux confirment l’arrivée de la reprise pour les prochains mois et un certain décalage avec les États-Unis. En effet, alors que les taux européens augmentent, le taux américain tend à stagner. Cela permet à la paire EUR/USD de se renforcer et d’améliorer l’attractivité à court terme de l’euro. Aux Étas-Unis, Janet Yellen a notamment déclaré que « la hausse des taux est nécessaire pour éviter la surchauffe de l’économie ». L’Europe n’est évidemment pas dans cette phase mais une absence de hausse des taux serait plutôt de nature inquiétante.
Hausse des taux
Nous assistons au même phénomène qu’aux États-Unis il y a plus de 6 mois, c’est-à-dire une hausse des taux. Le taux français à 10 ans est par exemple passé de -0.37% en décembre 2020 à 0.12% début mai 2021. De même pour l’Allemagne, le taux à 10 ans passe de -0.6% à -0.2%. Nous avons un clair mouvement de hausse des taux qui devrait être amené à continuer. Le taux d’inflation mensuel en Allemagne est passé de -0.5% en juillet 2020 à 0.7% en avril 2021.
À côté de cette hausse de taux, se cache des risques supplémentaires. Le passage vers des taux à nouveau supérieurs à 0% impliquent, malgré l’inflation, des risques budgétaires. La BCE devrait maintenir des rachats soutenus au moins jusqu’en 2022 tandis que les risques budgétaires s’accroissent. L’Europe, après le « quoi qu’il en coûte » devrait commencer à payer les conséquences de la crise. Le besoin de financement de la France en 2021 est par exemple estimé à 293 milliards d’euros ! De son côté, le service de la dette atteint les 118Mds€. Le risque d’impasse politique est fort, et la hausse des taux en cours va déterminer beaucoup de dynamiques à venir. Le fait que les émissions de dettes soient supérieures au service de la dette impliquera une augmentation systématique du poids de la dette contractée dans les prochaines années.
Plafonnement des indices.
Plafonnement de moyen terme
Comme nous l’avons traité dans notre précédent article, les indices sont confrontés à un problème de liquidités. La hausse des marchés vers de nouveaux records depuis plus d’un an résulte directement des liquidités injectées par les Banques centrales. À moyen et long terme, la corrélation entre base monétaire et indices est très forte. Cela pourrait très certainement conduire à des performances à deux chiffres dans les prochaines années sur les actions aux États-Unis. Cependant, les marchés restent en surchauffe à moyen terme et nous pourrions assister à des mouvements correctifs dans les prochains mois.
La reprise en Europe n’arrange rien. Les besoins de liquidités s’accroissent et les banques centrales n’amplifient pas leurs actions. La hausse des taux montre que la reprise en Europe impliquera des risques de liquidités plus forts qu’aux États-Unis. Au regard des indicateurs cycliques et techniques, ces risques pourraient se détendre pour le début de l’automne dans un premier temps.
Des risques à l’été et à la rentrée ?
Diverses dynamiques sont à différencier :
- La reprise implique un besoin naturel de liquidités. Le taux d’épargne en Europe reste très élevé (voir graphique ci-dessus), ce qui limite les risques de pénuries de liquidités. Cependant, la reprise se confirmera quand le taux d’épargne reviendra sur des niveaux plus faibles.
- La reprise implique la hausse de la prime inflationniste, et ainsi la hausse des taux. Bien que l’inflation structurelle ne devrait pas augmenter en Europe, l’inflation de conjoncture devrait se maintenir d’ici au moins à 2022. L’inflation (voir graphique ci-dessous) tend à retrouver des niveaux plus cohérents et soutien le phénomène de hausse des taux.
- Le sortir de la crise du COVID amplifie les risques d’endettement. Les États ont considérablement augmenté leurs dettes publiques. Les besoins de financement devraient s’accroitre dans les prochaines années. La France émet par exemple plus de dettes qu’elle n’en rembourse. Cela va mécaniquement conduire à la hausse du poids de la dette (supérieur au déficit en temps normal).
Des risques (limités) de nature monétaire pourraient ainsi émerger à l’été avec de légères tensions sur les taux. Ainsi, une divergence entre l’EUR/USD et le mouvement sur les taux européens serait un signal de risque.