Les années 1980 ont été le théâtre d’une mutation profonde des économies nationales. Dans la poursuite du développement du libre-échange et des flux de biens et de services dans le monde, la globalisation financière s’est développée à partir de l’expansion du système financier mondial. Le système financier correspond à l’ensemble des institutions (acteurs et marchés financiers) mondialisées qui organisent les transactions financières.
Les marchés financiers ont une réelle utilité dans l’économie :
– ils incitent les agents économiques à placer leur épargne du fait de la multiplication des opportunités de placement : actions, obligations, bons du Trésor des Etats (même si ces derniers sont difficilement accessibles en direct aux particuliers mais qu’on les trouve dans des fonds de placement communs à plusieurs particuliers proposés par les banques, dans le cadre des assurances-vie par exemple).
– ils permettent aux entreprises de trouver des sources de financement multiples, en émettant des actions et des obligations.
Néanmoins ils sont des sources récurrentes de déstabilisation de l’économie mondiale et des économies nationales via de terribles crises financières dont les dates ont marqué les mémoires collectives : par exemple le jeudi noir du 24 octobre 1929.
Les effets délétères sur l’économie réelle nous poussent à nous demander comment expliquer les crises financières et comment réguler le système financier.
Si l’ère industrielle a marqué le début d’un processus de croissance qui s’est étendu à la plupart des pays, cette dernière est loin d’être un long fleuve tranquille. Les phases d’expansion (hausse du PIB) alternent en effet avec celles de récession (baisse du PIB) voire de dépression (récession forte et durable, durant plus de 6 mois). Ces périodes de crise peuvent souvent être liées à des crises financières, dont, au cours du siècle dernier, la crise de 1929 et celle de 2008 sont les plus connues.
Mais comment naissent les crises financières ? Comment se propagent-elles à l’économie « réelle », c’est-à-dire comment se traduisent-elles en récession et en montée du chômage ? Et comment les régulateurs financiers peuvent-ils tenter de les prévenir ?
Demandons-nous d’abord comment les crises financières naissent. Voyons cela tout d’abord avec la crise de 1929, dite « grande dépression »
Au début des années 1920, les Etats-Unis connaissent une phase de croissance rapide, alimentée par le développement du fordisme et ses formidables gains de productivité, ainsi que par le développement du crédit à la consommation. Ce dynamisme économique fait monter les cours boursiers. La spéculation se développe : de nombreux acteurs (qu’ils soient financiers ou de simples petits porteurs) achètent des actions en souscrivant des emprunts, qu’ils remboursent en revendant les actions en réalisant une plus-value. La phase haussière du cycle boursier génère des comportements mimétiques (rationnellement, c’est imiter le comportement des autres agents en situation d’incertitude), source de prophéties autoréalisatrices (annonce des faits qui vont provoquer les faits et ainsi assurer la véracité de ses effets) : si l’opinion majoritaire est que les cours vont continuer de monter, tout le monde achète des actions, ce qui fait… monter les cours ! Mais on assiste alors à une déconnexion entre les cours boursiers (l’indice Dow Jones est multiplié par près de 4 entre 1920 et 1929) et la situation économique sous-jacente (un ralentissement économique survient en 1927) : une bulle financière s’est formée. On dira qu’une bulle se forme sur un marché lorsque le prix qui s’y forme augmente de façon durable et continue, si bien que le prix de l’actif ne reflète plus sa valeur réelle.
Cette dernière éclate en octobre 1929. Des rumeurs selon lesquelles des gros porteurs vendent leurs titres pour prendre leurs gains génèrent un vent de panique : les comportements mimétiques et les prophéties autoréalisatrices entrent une nouvelle fois à l’œuvre, mais cette fois-ci concourent à la chute des prix des actions. Tous ceux qui avaient emprunté pour acheter des actions voient le prix de leur collatéral (les actions qu’ils avaient en garantie de leur prêt) baisser, et sont contraints de procéder à des ventes forcées, qui accélèrent la chute des cours. De 1929 à 1932, l’indice Dow Jones perd 80% de sa valeur, la production industrielle américaine a baissé de moitié et le taux de chômage est passé de 3% à 25% de la population active. C’est la « Grande Dépression », qui se propagera à l’ensemble des pays industrialisés.
La « Grande Dépression » peut ainsi s’expliquer par l’effet domino et la ruée aux guichets.
La crise boursière de 1929 va très rapidement se traduire en crise bancaire : entre 1930 et 1933, 9000 banques disparurent, sous l’influence de multiples facteurs :
– certains acteurs bancaires avaient accordé des prêts à des petits porteurs pour acheter des actions : ils réalisent des pertes sévères lors du krach boursier
– les déposants qui craignent que leurs banques fassent faillite se ruent au guichet pour clôturer leurs comptes : ce phénomène de panique bancaire engendre une crise de liquidité pour les banques qui peuvent faire faillite (c’est pour éviter cet effet domino qu’existent désormais des mécanismes de garantie des dépôts : les déposants savent que même en cas de faillite de la banque ils retrouveront leurs économies, ce qui doit éviter les phénomènes de panique)
– la crise immobilière et économique qui suit la crise de 1929 fait que de nombreuses entreprises n’arrivent plus à rembourser leurs prêts, ce qui aggrave les pertes des banques.
Les trois causes précédentes engendrent un effet domino, qui conduit des banques à faire faillite du seul fait de la chute d’autres banques auxquelles elles avaient accordé des prêts. Le krach boursier de 1929 est l’événement le plus connu, il frappe d’autant plus les esprits qu’il semble un éclair dans un ciel serein.