Cet article vient clôturer notre série d’articles sur la monnaie…
Supposons que vous ayez décidé d’acheter une maison qui coûte 300 000 euros. Vous ne disposez pas de cette somme. Vous allez voir votre banquier qui après avoir examiné votre projet… vous accorde un crédit de 300 000 euros, c’est-à-dire qu’il met à votre disposition la somme dont vous avez besoin pour acheter votre maison contre l’engagement d’être remboursé dans le futur à une date déterminée.
En l’état actuel de vos connaissances essayez de répondre aux questions suivantes :
Comment la banque (par exemple BNP Paribas) fait-elle pour vous accorder ce crédit de 300 000 euros ?
Arrive-t-il que le banquier vous demande la « permission » d’utiliser les sommes présentes sur votre compte ?
Peut-on concevoir que le banquier « retire » les avoirs sans en informer le propriétaire du compte ?
Comment le banquier peut-il vous cacher le fait qu’il prête à d’autres clients la somme que vous possédez sachant que votre avoir (somme qui est sur votre compte) reste visible à tout instant sur votre compte bancaire ? Aujourd’hui vous pouvez à tout moment consulter vos comptes bancaires donc vous savez exactement la somme qui est sur votre compte.
Vous êtes un peu perdus ? Alors nous allons tenter de vous répondre.
Les banques de second rang sont à l’origine de la création monétaire.
Elles créent de la monnaie scripturale lors de l’octroi de crédits à partir de rien. C’est pourquoi l’on dit que « les crédits font les dépôts » : les crédits accordés par les banques donnent lieu à de la création de monnaie, laquelle sera détruite lors du remboursement (dépôt). Néanmoins, cette activité de création de monnaie est limitée car les banques de second rang s’exposent à des fuites : d’une part, des fuites vers les autres banques de second rang, d’autre part, des fuites de monnaie fiduciaire qu’elles n’ont pas le pouvoir de créer. Enfin, leur pouvoir de création monétaire est également limité par le taux de réserves obligatoires auquel elles doivent se soumettre (pourcentage de leurs dépôts que les banques de second rang doivent détenir sous forme de monnaie centrale). Pour faire face à ces fuites, et répondre à la contrainte du taux de réserves obligatoires, les banques doivent disposer de monnaie centrale, or elles n’ont pas le pouvoir de la créer. Seule la Banque centrale a le pouvoir de créer cette monnaie. Elles ont ainsi tendance à s’auto-limiter dans leur activité de crédit et donc de création monétaire. C’est la Banque centrale qui est chargée du contrôle de la masse monétaire et donc de la politique monétaire.
Elle peut contrôler la création monétaire par le biais de plusieurs leviers :
§ Celui des taux d’intérêt directeurs, c’est-à-dire les taux d’intérêt qu’elle propose aux banques de second rang qui ont besoin de liquidités sur le marché monétaire interbancaire (opérations d’open market). Elle peut augmenter ces taux si elle souhaite ralentir l’inflation et l’activité économique (en freinant la création monétaire, politique restrictive), et les baisser à l’inverse si elle souhaite encourager l’activité économique et l’inflation (en favorisant la création monétaire, politique expansionniste). Lorsque des banques de second rang ont besoin de liquidités, elles se les procurent sur ce marché auprès de la banque centrale ou d’autres banques de second rang ayant un excédent de liquidités (moyennant le versement d’intérêts, lesquels dépendent des taux d’intérêt directeurs fixés par la Banque centrale). Les règlements entre banques de second rang s’effectuent par l’intermédiaire de leur compte à la Banque centrale. En ce sens, cette dernière est « la banque des banques ».
§ Celui de la liste des créances qu’elle accepte de refinancer. Elle étend cette liste si elle souhaite favoriser la création monétaire, et inversement si elle souhaite freiner la création monétaire et les tensions inflationnistes.
§ Enfin, celui du taux de réserves obligatoires. Elle peut réduire ce taux pour inciter à la création monétaire et inversement pour ralentir création monétaire. Cependant, la crise des subprimes a rendu presque inefficaces les politiques expansionnistes mises en œuvre, notamment dans la zone Euro, pour relancer l’activité et susciter de l’inflation. Le risque de déflation a été tel que des politiques non conventionnelles ont été appliquées ces dernières années, notamment par la BCE : il s’agit en particulier de l’utilisation d’une mesure appelée quantitative easing, qui consiste à augmenter les liquidités des banques en rachetant à des conditions avantageuses les obligations d’État que ces dernières détiennent. Si les banques centrales recourent à l’extension de la liste des créances qu’elles acceptent de refinancer dans le cadre de politiques dites conventionnelles, le quantitative easing est considéré comme une mesure non conventionnelle dans le sens où ces rachats sont massifs et sur longue période. La Banque centrale est donc chargée de la politique monétaire d’une économie ou d’une zone (exemple : la zone euro) et assure également le rôle de prêteur en dernier ressort : ce rôle consiste à créer de la monnaie centrale pour assurer la solvabilité d’un établissement financier menacé de faillite ou alimenter le marché en liquidités dans le cas, par exemple, d’une panique bancaire.