Alors que la crise sanitaire semble toucher à sa fin, du moins dans la dimension de peur qu’elle engendre auprès des populations et des marchés financiers, une autre crise est arrivée brutalement, en quelques jours, tétanisant tous les esprits et accaparant les chaines d’info en continu. La peur généralisée, voire le sentiment de panique, est aussi brutal qu’il y a deux ans précisément. Sauf que ce n’est plus un virus qui fait peur mais un missile… Ou plutôt, depuis ce dimanche, le brandissement de l’arme nucléaire. Une peur en remplace une autre, et évidemment cela va constituer un beau prétexte pour les états de brandir la protection de leurs populations. Un brandissement dont ils ont besoin.
Aussi il nous semble pertinent de voir quelles peuvent être les projections de la situation actuelle et à venir sur l’économie et sur les marchés financiers.
La situation est très porteuse d’incertitudes… Elle n’est pas maitrisable comme pouvait l’être celle de la guerre en Irak ou en Lybie par exemple, car cette fois c’est la première puissance nucléaire du monde et la deuxième puissance militaire qui est l’objet des sanctions occidentales, et non un état du Moyen- Orient.
Une peur en remplace une autre, celle du COVID étant passée. Et évidemment les marchés financiers n’ont pas fini de s’agiter. Depuis l’invasion de l’Ukraine, on note que les marchés boursiers résistent bien, et ont même eu tendance à s’aligner sur les réflexes patriotiques des marchés américains. Mais jusqu’à quand l’effondrement sera-t-il évité ? Un krach brutal comme en 2020 lorsque la peur généralisée s’est saisie des investisseurs, reste possible. En 2020, les facteurs déclencheurs du krach furent l’arrêt brutal des économies. De manière parallèle, si les sirènes d’une alerte nucléaire ou même une alerte sérieuse aux bombardements venaient à retentir, il y aurait à nouveau un arrêt de l’économie et cela engendrerait un nouveau krach boursier. Heureusement nous n’en sommes pas là aujourd’hui, mais tout peut aller très vite…
En attendant, l’interruption des relations commerciales avec la Russie, l’interdiction faite aux avions de survoler la Russie et aux avions Russes de survoler l’espace européen, sont des facteurs de freinage de la reprise économique, et tout particulièrement des facteurs de freinage de la reprise du secteur du transport aérien qui avait déjà un mal fou à s’installer. Les tensions sur le pétrole et les matièrespremières devraient encore s’accentuer et l’inflation qui fait son grand retour depuis plusieurs mois et sur laquelle plusieurs articles ont été écrits sur YouTrading, a de grandes chances de s’accentuer. Cependant, l’annulation de nombreux vols d’avions (hyper consommateurs en carburant), freinera la hausse des cours du pétrole, sans pour autant l’arrêter car les facteurs de hausse restent plus importants que les facteurs de baisse.
Mais des mouvements sont aussi à attendre du côté obligataire et du côté des taux d’intérêt.
Alors que la BCE menaçait plus ou moins de remonter ses taux, à l’instar de la FED américaine, et d’arrêter d’arroser les marchés en rachats d’actions et d’obligations, ce qui a d’ailleurs fait baisser les actions depuis le début d’année, voilà que l’Europe s’engage dans un programme massif de soutien de l’Ukraine. Plusieurs pays vont ainsi fournir des armes à leur voisin agressé par la Russie de Poutine. Ce sont plusieurs milliards d’euros qui vont être débloqués. De ce fait, cela va créer de nouvelles lignes d’endettement car, rappelons-le, les états étaient déjà très endettées avant le COVID et le sont encore plus après deux ans de pandémie. Aujourd’hui la dette de la France, par exemple, est estimée à 116% du PIB.
Aussi, les différents états de la zone Euro ne peuvent pas, pour la plupart, piocher dans leurs caisses, et donc la BCE va probablement devoir revenir sur son durcissement annoncé, d’autant plus que l’arrêt volontaire des échanges avec la Russie ressemble à l’arrêt volontaire des transports en 2020. Même si l’impact sur nos économies sera, à ce stade du moins, plus léger. Avec 38 milliards d’euros, la Russie se place en troisième position des fournisseurs commerciaux de l’Union Européenne, derrière les États-Unis (71,4 milliards), et juste devant le Royaume-Uni (41,7 milliards).
Donc, face à cette réduction du commerce extérieur d’une UE très endetté, conjuguée à des dépenses en armement offert à l’Ukraine, la BCE risque de refaire tourner le planche à billets ! Même si cela n’a pas encore été annoncé ni peut-être même envisagé à ce stade. Ainsi, les taux obligataires qui étaient en train de flamber ont subi un coup d’arrêt depuis quelques jours. Le taux de l’OAT France 10 ans qui avait flambé jusqu’à 0.74% mi-février, a chuté autour de 0.60% ces derniers jours.
En résumé, un krach boursier est possible désormais, suivi d’un fort rebond, dû non pas à une reprise économique mais à une nouvelle politique accommodante de la BCE, si elle a lieu.
A noter que la dernière fois que les armes nucléaires ont été brandies c’était en 1962. Le Dow Jones était passé de 6500 points environ à 5200 points en quelques semaines soit une baisse de 20%.
Mais la boite avait alors été refermée. Le sera-t-elle cette fois ?