Les obligations sont généralement réputées pour leur cotation fiable. Ces cotations se basent sur des méthodes mathématiques claires qui permettent aux acteurs du marché de fixer des prix relativement stables. Mais on peut également tenter d’appliquer des méthodes de valorisation au cours des actions. Les actions sont plus instables que les obligations, et leur « valeur » dépend de paramètres et de considérations aussi différentes les unes que les autres. Néanmoins, deux paramètres majeurs influent sur la valeur fondamentale d’une action : le résultat qu’elle fournit (le dividende, la trésorerie…), et les perspectives de croissance qu’elle offre.
Le principe de l’actualisation
L’actualisation est une méthode souvent utilisée dans la valorisation des actifs. 100€ placés au taux de 3 % vaudront 103€ dans un an. De même, 100€ à recevoir à dans un an vaut (actuellement) 97,08€ [100€/(1+3%)], puisque l’argent qu’on ne reçoit pas aujourd’hui n’est pas rémunéré au taux du marché. La valeur future de trésorerie que l’on reçoit est donc ajustée du taux d’intérêt.
Une fois que ce principe est acté, il suffit de l’appliquer à l’entreprise. On appelle « flux de trésorerie disponible » pour l’entreprise le flux de trésorerie qui résulte de l’exploitation de l’entreprise (+) et des investissements réalisés (-).
La méthode DCF
Dans le cas de l’entreprise, la méthode DCF, pour flux de trésorerie actualisés en français, consiste à prendre en compte la trésorerie disponible de l’entreprise estimée pour les années suivantes et à actualiser ces flux. La valeur obtenue, déduite des dettes, nous donne la valeur de marché « fondamentale » de l’entreprise.
L’actualisation revient à prendre en compte « la valeur temps » en divisant le flux de trésorerie disponible chaque année par le taux d’intérêt. Ainsi, pour l’année 2022+i, la formule de l’actualisation est donnée ci-dessous.
Pour la parenthèse, le taux d’actualisation ( r ), est déterminé à partir du coût moyen pondéré du capital utilisé.
Exemple Air Liquide
Nous allons ici prendre un exemple a posteriori. Par exemple, Air Liquide a acté un flux de trésorerie d’exploitation de 5 810 millions d’euros en 2022, et a investi 3 273 millions d’euros. Il s’en suit que le flux de trésorerie disponible est de 2 537 millions d’euros en 2022 (5810-3273). Voici les différents flux de trésorerie disponibles depuis 2018 pour Air Liquide.
Année | Flux de trésorerie disponible | Valeur actualisée (année de référence = 2018) |
2022 | 2537 | 2537/(1+4,9%)^5 |
2021 | 2653 | 2653/(1+4,9%)^4 |
2020 | 2575 | 2575/(1+4,9%)^3 |
2019 | 2075 | 2075/(1+4,9%)^2 |
2018 | 2467 | 2476/(1+4,9%)^1 |
TOTAL | x | 10665 |
Ainsi, au 30 juin 2020, le coût moyen pondéré du capital utilisé pour Air Liquide était de 4,9 %. On considère par simplification ce taux sur l’ensemble de la période. On actualise alors l’ensemble de ces flux à 2018, en considérant que 2018 est « le présent ». Mais considérer que l’entreprise génèrera de la trésorerie sur 5 ans seulement n’est pas suffisant. Il faut étendre ce flux de trésorerie « jusqu’à l’infini ». A l’aide d’un tableur Excel, on a ainsi étendu un flux de trésorerie disponible de 2600 millions d’euros.
Enfin, il convient d’obtenir la valeur de marché en L’endettement net de Air Liquide mi-2018 était de 14 217 millions d’euros. Les capitaux propres en 2018 de la société s’élevaient à 17 051 millions d’euros. L’entreprise est valorisée de sorte que la somme actualisée de la trésorerie soit égale à la somme des capitaux propres et de l’endettement net. Il ressort donc que l’entreprise était valorisée en 2018 sur 20 années de flux de trésorerie disponible actualisée (jusqu’en 2038).
De même, il ressort que la valeur actualisée à l’infini (endettement net déduit) est proche de 50 000 millions d’euros. En divisant cela par le nombre d’actions, on retrouve que le prix de l’action en 2018 pouvait s’évaluer autour de 96€. Ce qui était effectivement la valeur atteinte un an plus tard, en 2019. On voit donc bien que cela permet de juger d’une valeur de marché future.
La valorisation avec les dividendes
Une méthode (très simple) consiste par exemple à anticiper le dividende versé par l’entreprise. Par exemple, si le dividende est de 2€, puis de 2,5€ estimé pour l’année suivante, alors si l’action fournit un taux de rendement de 2 %, le cours de l’action sera de 100€ la première année (2€/2%), puis 125€ l’année suivante (2,5€/2%), à taux de rendement constant.
Il convient donc de prendre en considération l’existence d’une « valeur fondamentale », qui dépend du taux d’intérêt fournit par les autres marchés et actions, et du dividende fournit par l’entreprise.
Une autre mesure consiste, dans la logique du DCF, à prendre la cash-flow par action et à l’actualiser pour obtenir le prix actuel. Le cash-flow par action en 2022 était de 11,1€. Pour obtenir en prix de 130€ (cours actuel), il faut actualiser 24 années de cash-flow à 11,1€ (et seulement 15 ans en considérant un taux de croissance 4 % par an du cash-flow par action). On voit donc les applications multiples de la méthode par actualisation.