En économie, l’élasticité est une notion déterminante. On se concentrera ici sur le calcul de l’élasticité pour l’indice phare des actions américaines : le Dow Jones. Aussi, nous montrerons que l’idée globalement admise, que la hausse des prix encourage la hausse de la demande d’actifs, n’est pas tout à fait exacte. L’étude de l’élasticité est d’autant plus centrale en finance que de nombreux investisseurs se basent sur les volumes échangés sur les marchés. Il est central de saisir dans quel contexte la relation volumes/prix est pertinente en finance.
Une approche de l’élasticité.
Simplement écrit, l’élasticité est l’évolution de la demande provoquée par la variation du prix d’un actif donné. Par exemple, si la demande d’essence est de 100 litres à un prix de 1,2€/L ; et que la demande passe à 80 litres avec un prix de 1,5€/L ; alors l’élasticité est de -0,8 (variation de la demande/variation du prix =-20%/+0,25%=-0,8). L’élasticité des prix permet de déduire quelle est la variation de la demande pour une variation donnée du prix. Avec l’élasticité, on compare deux variations, ce qui permet d’obtenir un ratio.
Il existe également l’élasticité mesurée en fonction du revenu ou encore en fonction d’autre biens, mais on se concentrera ici sur l’élasticité des prix. Par souci de simplification, on notera qu’on prendra ici en compte les volumes échangés sur les marchés comme statistique de demande. L’étude des volumes est absolument centrale en finance, car les volumes demeurent un déterminant majeur du prix des actifs. Les grandes baisses ou les grandes hausses sont toujours le fait de volumes.
Théories et élasticité du Dow Jones.
Elasticité du Dow Jones.
Nous avons réuni ici près de 1300 données journalières pour le Dow Jones entre novembre 2016 et novembre 2021, c’est-à-dire sur une période de 5 ans. Le recul relativement suffisant nous offre les conclusions les plus prodigieuses. Tout d’abord, l’élasticité journalière moyenne mesurée sur le Dow Jones entre 2016 et 2021 est de -1,3. Cela signifie qu’une hausse du cours de 1% du Dow Jones conduit en moyenne à une réduction de la demande de 1,3% en données journalières.
Cela va à l’encontre de certaines croyances microéconomiques selon lesquelles les actifs financiers ont systématiquement une demande croissante avec le prix. L’élasticité négative s’accentue encore au niveau des données hebdomadaires. L’élasticité hebdomadaire mesurée sur les volumes est de -13,7 ; c’est-à-dire que toute variation négative du prix a tendance à traduire un effondrement des quantités demandées. Mais là encore, cette donnée est à relativiser du fait de la cyclicité des prix.
Nous retrouvons sur ce graphique notre élasticité en hebdomadaire (courbe noire). Les variations des volumes sont en général 10 fois supérieures à celle des prix (courbe rouge). La hausse des volumes est un phénomène caractéristique, sur une semaine, de l’instabilité des prix, ce qui est moins le cas en journalier. Il y a donc à court terme une corrélation inverse relativement faible entre les volumes et les prix. Cette corrélation volumes/prix devient positive lorsque l’on considère les grands mouvements de tendance (plus de 3 mois).
Comparaison des volumes et des prix.
De plus, nous pouvons nous concentrer sur certaines propriétés des volumes, en tous cas sur actions. Le graphique ci-dessus reprend les variations du prix en abscisse (horizontal) et les variations des volumes en ordonnée(vertical). Mais que nous dévoile exactement le graphique en étoile ci-dessus ? Ce graphique est extrêmement explicite sur le fait que les grandes variations des prix (krach ou rebond) s’accompagnent d’une forte stabilité des volumes. Cela démontre une fois de plus que les mouvements extrêmes sont toujours le fait de comportements unidirectionnels. A l’inverse, une grande stabilité des prix s’accompagne d’une plus forte instabilité des volumes.
Pour l’écrire simplement, les périodes de « range » ou de stagnation des prix ont des volumes instables, difficilement comparables entre eux. A l’inverse, les périodes d’instabilité des prix (forte tendance haussière ou baissière) traduisent des volumes qui changent peu d’une période sur l’autre.
Propriétés fondamentales.
En réalité, l’élasticité cache des propriétés plus fascinantes encore. Dans nos publications précédentes, nous étions revenus sur les limites statistiques d’accroissement. C’est-à-dire qu’il existe des limites temporelles sur les marchés, au-delà desquelles les prix peuvent presque impossiblement évoluer, ce qui se traduit par la récurrence de cycles.
Le graphique ci-dessus reprend le cours du Dow Jones (en noir) avec les variations cumulées des volumes (en bleu). Le premier fait tout à fait prodigieux réside dans le fait que les variations cumulées des volumes (courbe bleu) ne sont jamais durablement passées sous le seuil des 0% (axe de droite). C’est-à-dire que les volumes ne peuvent pas décroître durablement sur les marchés, et que chaque décroissance prolongée des volumes serait un signal d’achat. Par ailleurs, on notera la présence du seuil des 100% de cet indicateur, qui est amène de traduire un affaiblissement ou un renforcement des nouveaux volumes, et donc une force de tendance sur les prix.
L’indicateur de variations cumulées permet de mettre en évidence les moments où le cours n’est plus soutenu par les volumes. Pour l’heure, on remarque sans détour le phénomène d’accumulation des volumes sur le Dow Jones qui a pris effet autour d’octobre 2020 (hausse prolongée des volumes suivi d’un mouvement haussier par accumulation des acheteurs). La force d’évolution des volumes est également sur des niveaux plutôt faibles en cette fin 2021. Cela peut traduire l’essoufflement de la tendance haussière des derniers mois avant une possible accélération dans un canal de long terme.
En bref.
Que déduire alors de la fiabilité de l’étude des volumes par rapport aux prix ? Le lien prix/volumes est de nature complexe sur les marchés financiers. Bien que la hausse des prix s’accompagne d’une hausse des volumes à long terme, le constat est plus contrasté à court terme. Les volumes varient fortement quand les prix stagnent, tandis que la variation prononcée des prix se traduit par des variations relativement stables des volumes. En bref, le volume, c’est la définition d’un indicateur de décision des acteurs du marché. En finance, les prix déterminent en partie les volumes échangés, mais l’influence des volumes échangés sur le prix est au minimum aussi importante (phénomènes d’accumulation d’offre ou de demande, etc…).