Le système interbancaire est au cœur du mécanisme de crise, et de leur récurrence dans le temps. Les premiers systèmes interbancaires sont apparus il y a près de 800 ans. Le système interbancaire pèse dans le monde plusieurs milliers de milliards de dollars chaque mois. L’ICMA précise que « le marché mondial, bien qu’il se soit contracté depuis 2007, pourrait représenter plus de 15 000 milliards d’euros de taille exceptionnelle et un chiffre d’affaires d’environ 3 000 milliards d’euros par jour. ». Récemment, les positions de la FED sur le marché du Reverse Repo augmentent à coups de centaines de milliards chaque mois, ce qui est conséquent.
Comprendre le système interbancaire.
Premiers systèmes interbancaires.
Bien que des formes de banques soient apparues dès l’antiquité, les premières banques apparaissent essentiellement à Florence et en Italie au XIIIe siècle. Ces familles bancaires (Ricciardi, Frescobaldi, Bardi, etc…) établissent entre elles un système de crédit complexe, alimentant les prêts via des dépôts, des impôts ou des prêts interbancaires.
À cette époque, l’important besoin de financement des rois (dette publique) implique une forte demande de liquidités, que les familles bancaires sont dans la nécessité de trouver sur le marché interbancaire. Plus tard, le perfectionnement de l’impression, la diffusion des billets et les premières banques centrales viendront établir les bases de ce système.
Fonctionnement et ampleur du système interbancaire.
Le système interbancaire permet à des institutions de se prêter des liquidités à court terme. Ce système est principalement utilisé par les banques qui peuvent ainsi gérer leurs risques et actifs de manière optimale. Une banque A disposant d’un excès de liquidités peut ainsi prêter à une autre banque B au taux du marché. Pour garantir son emprunt, la banque B va ainsi bloquer des actifs en réserve (des bons du trésor généralement).
Lors de la transaction, un haircut peut également s’appliquer, c’est-à-dire que le prêteur retient des garanties supplémentaires. Un haircut de 10% par exemple va traduire un prêt de 90$ par exemple pour le prêteur, en échange de 100$ de garanties fournies par l’emprunteur. Au-delà de cette particularité technique, on distingue ainsi deux types de pratiques interbancaires :
- Le Repo : le prêt est effectué en cash tandis que la garantie est constituée d’actifs.
- Le Reverse Repo : le prêt est effectué en actifs et la garantie est constituée de cash.
Des volumes plus importants sur Reverse Repo traduisent un intérêt pour les actifs et un désintérêt envers les liquidités. À l’inverse, des volumes en hausse sur le marché Repo traduisent un intérêt plus grand pour les liquidités.
Le marché interbancaire dans le contexte monétaire actuel.
Le marché interbancaire est à ce jour le principal élément d’action des banques centrales. Ainsi, une politique d’assouplissement quantitatif (ou QE), traduit le fait que la banque centrale va prêter de l’argent créé et va recevoir en échange des garanties (bons du Trésor en général), ce qui fait augmenter son bilan. Tout l’enjeu des politiques actuelles se joue ainsi à travers le bon fonctionnement du marché interbancaire.
À l’inverse, la banque centrale peut alimenter le marché en actifs en pratiquant des politiques de facilités sur le marché du Reverse Repo. C’est-à-dire que la banque centrale va prêter des actifs aux institutions financières en échange de liquidités, ce qui permet de limiter certains phénomènes comme la hausse des taux obligataires.
Une réduction du soutien sur le marché Repo augmente statistiquement les risques de correction sur les marchés. Le taux de croissance de la masse monétaire dépend en effet des opérations de Repo (augmentation de la création monétaire) et de Reverse Repo (réduction de la création monétaire). La forte correction observée récemment sur cryptomonnaies s’insère par exemple dans le grand revirement mené par la FED depuis avril 2021. L’objectif de la banque centrale est simplement d’éviter d’avoir des taux Repo négatifs (passant de 0,02% en juin à 0,06% en août).
Crises et mécanismes de liquidités.
Manque de liquidités et corrections des marchés.
Toutes les grandes crises contemporaines ont été précédées d’une crise du marché interbancaire. Une rupture de liquidités du fait d’une création monétaire insuffisante ou d’une politique monétaire de rigueur (vente des actifs détenus par la banque centrale) sont propices à provoquer de fortes tensions entre les institutions. L’instabilité du système interbancaire débouche statistiquement sur l’instabilité des marchés actions, et souvent de l’économie.
Le graphique ci-dessus reprend la volatilité mesurée sur le marché Repo de la zone euro par la BIS [source]. On notera ainsi que la volatilité sur le marché interbancaire est un élément d’explication majeur à la volatilité globale des marchés boursiers. Actuellement, d’après le groupe CME, l’activité mesurée sur le marché repo européen était en hausse annuelle de +14% en mai 2021.
En bref.
En clair, le système interbancaire est un indicateur systémique majeur. Les marchés sont particulièrement dépendants de l’état du marché interbancaire. En effet, au-delà du fait que les taux déterminent le prix des actifs, le marché interbancaire détermine la demande supplémentaire issue de l’injection ou de retrait de liquidités de la part des banques centrales. Ces deniers mois, la banque centrale américaine retire massivement des liquidités du marché, ce qui ralentit les performances haussières des marchés en parallèle aux rachats massifs toujours en cours.