Market is liquidity !
Liquidité : constante des marchés boursiers.
Comme le décrivait le biographe d’un des plus grand spéculateur (Jesse Livermore) dans Mémoires d’un spéculateur : « les gros coups ne se réalisent pas sur des fluctuations individuelles, mais sur de grands mouvements […] en ayant une vision globale du marché et de sa tendance ». Le grand succès de Livermore s’est manifesté lors de la panique du 24 octobre 1907 : « Comme l’argent se faisait de plus en plus rare, les taux d’intérêt à court terme montèrent et les actions baissèrent : je l’avais prévu. ».
Cette phrase résume à elle seule l’importance de la structure économique pour l’évolution des cours bousiers. Plus d’un siècle après, rien n’a réellement changé. La déconnection entre bourse et économie n’est finalement que très relative. Les règles du jeu en bourse sont les mêmes depuis le début du Capitalisme. La fonction primaire de la bourse est de financer les entreprises. Si le financement s’accroît, même sans utilité économique structurelle, la bourse aura mécaniquement tendance à monter car les demandeurs s’accumulent.
Mesure de la liquidité : le taux et le stress.
Les liquidités sont liées aux taux et au stress financier. On entend par stress financier la volatilité du marché. L’expérience du célèbre spéculateur Jesse Livermore en 1907 est assez révélatrice. À la fin du XIXe et au tout début du XXe siècle, les krachs boursiers se traduisaient (comme aujourd’hui) par une pénurie de liquidités, et donc le plus souvent par une hausse des taux dans un système sans banque centrale. En 1907, les banquiers n’étaient pas en capacité d’alimenter les besoins de financement des entreprises, ce qui a conduit à une véritable panique.
De nos jours, les grands krachs apparaissent très souvent après une stabilisation des taux directeurs avant une chute de ceux-ci. La théorie qui veuille que les baisses de taux directeurs soient suivies d’un krach boursier montre clairement l’importance des liquidités. Quand les taux d’intérêt montent, à toutes les époques, le prix de la monnaie augmente, les liquidités diminuent, et les marchés se survalorisent implicitement, ce qui conduit inévitablement à une baisse instantanée ou postérieure. Cette baisse des cours prend souvent effet quand la situation économique se dégrade (et donc quand les taux directeurs baissent également).
Ainsi, la liquidé se mesure par l’évolution des taux mais également du stress financier (volatilité) qui en découle. Ces dernières semaines, nous arrivons sur un niveau clé du VIX, et la situation de crise que nous connaissons rend d’autant plus difficile le franchissement de ces supports de volatilité.
Bilan de la Banque centrale américaine…
À moyen terme
7820 milliards de dollars : c’est le Bilan de la FED, banque centrale américaine en avril 2021. Un des instruments de mesure de la liquidité est justement le Bilan des banques centrales de nos jours. C’est un indicateur non négligeable. Il s’avère effectivement que les marchés tendent parfaitement vers les niveaux des liquidités disponibles, tant à long terme, qu’à court terme.
Le graphique ci-dessus reprend l’évolution du Bilan de la FED (en bleu) avec l’évolution du S&P500 (en rouge). On observe de manière claire que le S&P500 n’a cessé de rattraper à moyen terme les niveaux de liquidités imposés par la FED depuis un an. Ces dernières semaines, nous sommes entrés dans une zone de survalorisation de moyen terme, ce qui peut enclencher une baisse de nature corrective dans les prochains mois.
Ce scénario est confirmé par le signal sur les taux (stagnation) et le signal sur Bitcoin (correction). On notera en effet qu’une correction du Bitcoin a statistiquement de fortes chances d’être suivie d’une correction des marchés boursiers, car le Bitcoin est un actif hautement corrélé au stress financier. De même, plus de 80% des corrections haussières des taux à moyen terme sont suivies d’une correction des marchés actions.
À moyen terme donc, les marchés actions deviennent survalorisés. On notera en effet qu’entre mi-mars 2020 et mi-avril 2021, le Bilan de la FED augmente de plus de 67% quand le S&P500 progresse de plus de 86%.
À long terme
Le graphique ci-dessus reprend le Bilan de la FED et le S&P500 depuis 2012. On notera trois phénomènes :
- Le premier phénomène est un processus de hausse à long terme des cours du S&P500, qui s’est comparativement rapproché des liquidités disponibles, surtout en 2018.
- Le deuxième phénomène a été un processus de survalorisation par rapport aux liquidités disponibles entre 2018 et 2020 (hausse des taux et survalorisation implicite). Le krach de 2020 a mené comparativement le S&P500 sur des niveaux des liquidités équilibrés à la valorisation du marché.
- Enfin, le processus que nous conaissons depuis mars 2020. Nous avons assisté à une expansion considérable de la masse monétaire et du Bilan de la FED. Depuis, les marchés tendent à monter continuellement à moyen terme, cherchant à suivre les niveaux de liquidités disponibles.
En conséquence, ce graphique nous montre clairement que les marchés devraient rester globalement haussiers pour les années à venir. Le S&P500 devrait s’approcher du niveau des 5000 au cours des prochaines années (l’objectif dépend du recul statistique). Cette conclusion est assez cohérente avec le fait que le risque de krach boursier est extrêmement limité quand les taux directeurs sont bas.
Conclusion
En définitive, rien n’a réellement changé dans l’Histoire. La différence d’intensité de la dépendance aux liquidités est assez simple à saisir. Le poids de l’État dans l’économie a été en moyenne multiplié par 3 à 5 fois ce qu’il représentait au début du XXe siècle. Nécessairement, nous avons assisté à une centralisation des pouvoirs économiques, ce à quoi il faut ajouter la création des banques centrales. Dans tous les cas, le problème des liquidités rythme le cœur des marchés boursiers. De nos jours, les liquidités sont de plus en plus dirigées par l’action des banques centrales, à travers les taux qui influent sur les bilans centraux. L’importance de ces indicateurs est considérable à moyen et long terme.