Alors que les marchés sont revenus sur les niveaux d’avant crise, certains réajustements économiques inquiètent les marchés. Les diverses dynamiques de reprise, le risque inflationniste et de solvabilité devraient être encore au cœur des attentions. L’intensité toute particulière de la crise en 2020 peut être à l’origine de risques économiques nouveaux. Les marchés devraient rester sensibles à la conjoncture économique pendant au moins un an au regard des prévisions économiques.
Reprise économique et crise sanitaire
Reprise économique (fortement) différenciée.
La reprise économique est très contrastée au niveau mondial. La Chine a déjà rattrapé les niveaux d’avant crise : après avoir subi une chute du PIB de 6,8% au T1, elle a enregistré une croissance de 8,2% sur les deux trimestres suivants.
De leur côté, les États-Unis restent, au dernier trimestre 2020, avec un PIB 2,5% inférieur à celui de 2019. PIB qui a néanmoins connu un fort rattrapage de croissance sur le deuxième et troisième trimestre. En Europe, le rattrapage n’a pas pris effet et la récession a persisté (-0,7% au T4 et -6,8% sur l’année 2020). Le premier trimestre 2021 sera déterminant pour mesurer les distorsions à venir.
La crise sanitaire commence à s’éclipser lentement mais la réalité économique est contrastée. De plus, le taux d’épargne reste anormalement élevé (13,7% aux États-Unis pour le T4), en dépit de la chute de l’investissement. En conséquence, le taux de chômage tend à rester élevé (6,3% pour les États-Unis en janvier 2021).
Ainsi, les marchés seront principalement attentifs au risque de crise de solvabilité qui est tout particulièrement élevé (hausse des dettes mondiales de 8,6% en 2020, dont une hausse de 16% des dettes publiques mondiales).
La hausse des taux se poursuit
Les anticipations inflationnistes au cœur des inquiétudes.
Le risque inflationniste semble être une inquiétude majeure du marché, à court et long terme. En effet, une hausse de l’inflation à long terme rendrait les politiques monétaires moins accommodantes et provoquerait des tensions sur les taux (hausse du coût de la dette supérieur aux recettes dues à l’inflation).
Divers éléments vont en ce sens comme (1) la hausse du prix des matières premières dans de nombreux pays et (2) la hausse des coûts de production du fait de la chute de la productivité. On notera en effet que la productivité américaine a chuté de 4,8% au dernier trimestre 2020. Ce qui reste sans précédent depuis au moins 2008.
La crise du COVID est une crise d’offre particulièrement intense. Pour la France, l’indice PMI qui mesure l’activité manufacturière, reste plus ou moins durablement sous les niveaux d’avant crise (47 au 22/01/2021 contre 52 il y a un an). Et ce malgré un très bon rattrapage ces derniers mois.
La hausse des taux : une menace de marché ?
Le retour des anticipations inflationnistes a provoqué une hausse des taux souverains. Les taux ont retrouvé les niveaux d’avant crise aux États-Unis, et ce malgré les interventions centrales. Pour l’instant, la hausse des taux s’inscrit dans un processus normal de réajustement taux réel/croissance. Cela permet d’alimenter la reprise économique de manière optimale, ce qui n’est pas le cas en Europe. L’Europe devrait assister au même phénomène obligataire si la reprise économique se confirme. Ce qui est potentiellement risqué en raison de la sensibilité accrue des États européens à une hausse des taux.
Après avoir culminé à 3,2% en octobre 2018, le taux US à 10 ans a chuté jusqu’à 0,55% en mars 2020. Le phénomène de hausse des taux est amplifié par (1) la reprise économique, (2) les risques inflationnistes et (3) la diminution de l’intensité des politiques monétaires. Pour l’instant, les taux restent dans des niveaux maîtrisés. Mais la présence de lourds déficits publics, d’un risque d’insolvabilité et d’inflation sont autant de menaces de dérapage du marché obligataire.
Quels impacts sur les marchés
Les marchés ont fortement progressé à partir du printemps 2020 grâce à l’abondance de liquidités et de la reprise économique partielle. L’annonce du vaccin a également précipité le retour des indices sur les niveaux d’avant crise et au-delà en fin d’année 2020.
Comparé à la base monétaire, les marchés boursiers ont même perdu une faible partie de leur valorisation pré-COVID. En effet, le ratio Dow Jones/Base Monétaire M2 (USA) est à 1,6 en février 2021 (contre 2,4 en 2000 ; 1,8 en 2007 ; et 1,8 fin 2018). Les marchés subissent aujourd’hui un phénomène de plafonnement monétaire.
Des risques majeurs sur les marchés pourraient apparaitre dans le cas d’une crise de liquidités. Si les menaces d’inflation et de crise de solvabilité reste modérées, alors les marchés devraient rester globalement calmes. Néanmoins, les réajustements économiques qui opèrent restent sans précédent et des défaillances (budgétaires, monétaires ou financières) ne sont pas à exclure.
En conclusion, les risques inflationnistes font courir un risque de tensions sur les liquidités. Les différentiels à venir de croissance, de solvabilité et d’inflation, seront à l’origine de distorsions économiques très fortes. Les marchés devraient ainsi rester prudents pendant encore au moins une année au regard des prévisions économiques.